Chaque jour offre au moins une heure, un moment à qui sait regarder. Étudier les jeux d’ombre et de lumière pour accéder, à travers eux, à une pensée nouvelle. Plus haute, à nu. S’en saisir et l’écrire, vite et clair. Voilà toute la tâche de Raquel Nobre Guerra, qui offre chacun de ses poèmes comme trace du combat : les mots sont ce qui subsiste de vérité après son attaque éclair portée contre les apparences du réel. La percée peut se produire n’importe où, n’importe quand, mais avec une prédilection pour le matin. Un rien suffit. Un geste, un corps, un bruit. L’envol se produit. Et la langue, elle, a intérêt à suivre le rythme. Un mot plus faible, une phrase en deçà et la poétesse peut très bien la laisser plantée là, inachevée, avortée, pour courir après sa proie : la beauté d’une révélation, ténue, entre la mort et la joie.
Je ne suis prête ni à tomber ni à m’élever
je suis pareil à toi il y a mille ans seul
avec les étoiles et un cœur en gelée
je chante le corps comme tous les autres
avec en plus le stroboscope du présent
j’ouvre et referme les yeux pour retourner le rêve
en de prompts flashs d’épuisement
voilà tout ce que tu vois
ma première et dernière volonté
pliées en deux et ouvertes pour toi.